réal. charlie kaufman & duke johnson, scénario charlie kaufman, int. david thewlis, jennifer jason leigh, tom noonan. 2015, 90′. 3,5 pouces
le synopsis
auteur à succès, michael stone (thewlis) débarque à cincinatti pour donner une conférence. marié et père d’un petit garçon, il est, malgré son succès, …
… sclérosé par la banalité de sa vie. dans l’hôtel où il est descendu, il va rencontrer lisa (jason leigh), une femme vraiment différente qui pourrait être l’amour de sa vie. ou pas.
l’avis
anomalisa est adapté d’une pièce de théâtre écrite il y a plus de dix ans par le même charlie kaufman, sous le pseudo francis fregoli (clin d’oeil, c’est le nom de l’hôtel dans le film). la pièce était écrite pour être écoutée et non vue, si bien que les acteurs, qui tenaient déjà leur rôle respectif, interprétaient le texte tandis que des cartons racontaient l' »action ». difficile donc de visualiser ce qui n’avait à l’origine pas été conçu pour être montré. les auteurs ont donc opté pour l’animation, procédé qui, en désincarnant les personnages, permet justement de se concentrer davantage sur leur psychologie, ou plutôt sur celle du personnage principal, michael stone. rythmée par le succès, sa vie n’en est pas moins ennuyeuse. une intrigue qui n’est pas sans rappeler lost in translation. mais la similitude s’arrête là car michael stone perçoit tous les gens qu’il rencontre comme étant identiques. si bien que tous, y compris les femmes, y compris la sienne, ont la même voix, une voix d’homme de surcroît (noonan). déroutante au début, l’idée est excellente. michael stone est de ces hommes pour qui une femme ressemble à toutes les autres une fois que la phase de séduction est passée. d’où le fait qu’elle finisse très vite (pour lui) par avoir la même voix que n’importe quelle autre femme. lisa, qui partait pourtant gagnante à ses yeux, finira dans la même catégorie. stone n’est pourtant ni macho ni méchant. c’est juste un type englué dans une vie sans aspérité, conscient de son problème, mais incapable d’en sortir.
le choix de l’animation donne ici une force inattendue à un propos somme toute assez classique. d’autant qu’il ne s’agit pas de n’importe quelle animation. ni images de synthèse ni plasticine. les créateurs ont opté pour l’impression 3d, censée apporter plus de réalisme aux figurines. ainsi les plus de 1200 visages, comme faits en feutrine, et les 150 personnages ont été modélisés avant d’être imprimés et modifiés en fonction de la scène. sans compter la construction des 18 décors et des 1000 accessoires, façonnés, eux, à la main. lorsqu’on sait qu’en plus de cette étape indispensable de préproduction, il faut parfois plusieurs semaines pour réaliser une seule scène qui ne durera que 30 secondes, voire moins, à l’écran, on comprend mieux qu’une telle production peut parfois prendre des années.
la mise en scène volontairement statique, faite de mouvements de caméra assez lents, les profondeurs de champ, la lumière et le cadre très cinématographiques contribuent à installer un climat étrangement « vrai » et dérangeant, mais aussi à s’identifier au malaise de cet « homme » en constant décalage dans son rapport aux autres, incapable d’exprimer des sentiments pourtant simples.
vainqueur, une première pour un film d’animation, du grand prix du jury au 72e festival de venise en septembre dernier, anomalisa est nommé aux oscar dans la catégorie film d’animation.
déroutant mais intéressant.