réal. m. night shyamalan, scénario gary whitta, stephen gaghan et mark boal, sur une idée de will smith, int. will smith, jaden smith, sophie okonedo, zoë kravitz. 2013, 100'. 3 pouces.
le synopsis
revenus par accident sur une planète terre désertée par l'humanité depuis 1000 ans, un père et son fils adolescent se battent contre un environnement hostile pour…
… sauver leur vie et (re)trouver le respect mutuel…
l'avis
la première chose qui frappe dans ce film, c'est qu'il y aura toujours des rangers dans 1000 ans. mdr. les américains ne doutent décidément de rien.
la deuxième chose, c'est qu'on est assez loin du style habituel de shyamalan. pas de souci, pense-t-on, il est bon qu'un réalisateur se renouvelle et "fasse là où on ne l'attend pas". sauf que l'entreprise n'est rien d'autre qu'une auto-glorification de la famille smith (will est à la fois scénariste, acteur et producteur) doublée d'un adoubement du jeune jedi, pardon jaden, façon bienvenue-dans-la-famille-des-tout-puissants-maîtres-du-monde-super-stars-intergalactiques, un garçon dont le monde entier, mais surtout son papa et accessoirement lui-même, voudrait nous faire croire qu'il est un bon acteur et aimerait bien qu'il prenne la relève (si papa produit, fiston évitera les castings, et le tour est joué ni vu ni connu). tout ça sur fond de vague idéologie scientologue non affichée (cruise a pris des coups et smith n'est pas bête) dont subsistent tout de même le conditonnement psychologique ("habilement" dissimulé sous le label "ranger") mais aussi le sous-titre du film qui nous informe que "le danger est réel, la peur est un choix". signalons à toutes fins utiles que c'est l'un des préceptes des disciples de lafayette ronald hubbard, auteur prolifique (100 romans et 83 millions d'exemplaires vendus dans le monde) de science-fiction (dont mission terre et l'empire de la peur), puis de la dianétique, puis fondateur de l'église de scientologie. ce ne sont pas les seuls références à cette dernière: l'insistance sur la nécessité de vivre l'instant présent, d'en ressentir les sensations et de se détacher du passé, mais aussi l'image du volcan, constante dans la communication des scientologues, participent également des thèses de l'église. mais passons. vite.
or donc l'adoubement à peine dissimulé (accompagné d'une tournée de promo que les media présentent comme triomphale mais on n'est pas dupes) vient un peu parasiter l'intérêt de cette histoire. will smith n'est jamais aussi bon que dans les comédies genre men in black. il n'a jamais été l'acteur de l'intériorité (voilà que je me mets à écrire comme un critique de cinéma, moi) et il passe ici le pouvoir à un niard inexpressif qui "se voyait déjà en haut de l'affiche" (et qui y est parvenu, merci papa). le tout dissimulé dans un récit sur la difficulté d'être père pour l'un, c'est-à-dire sur la disproportion entre ses exigences et l'incapacité (momentanée, car chez les smith, failure is not an option) de son fils à les satisfaire malgré tous ses efforts, et la difficulté de devenir adulte pour l'autre – mais la morale (des smith) sera finalement sauve puisque le fils répondra aux attentes et deviendra ranger (star). plus transparent que ça.
la troisième chose qui frappe dans ce film, c'est qu'on nous avertit dès le début du film que les espèces sur terre ont évolué en 1000 ans pour détruire l'espèce humaine. or, au cours de son voyage initatique, car c'est bien de cela qu'il s'agit, le gamin va rencontrer, dans l'ordre, un groupe de babouins, certes agressifs, une sangsue, certes mortelle, un aigle, qui veut juste nourrir ses petits, des sangliers pacifiques et des sortes de félins qui ressemblent à des tigres mais sans les rayures. mort de rire. si, la créature la plus hostile à l'homme est dénommée "ursa", extraterrestre comme il se doit, et extrêmement létale car équipée de plein de bras, d'une mâchoire à faire peur à un alien et de pinces genre rasoirs. au final, cet univers prétendument effrayant ressemble davantage à une balade dominicale en forêt de rambouillet qu'à l'environnement angoissant de predator.
la quatrième (non, ce n'est pas fini) chose qui frappe (protégez-vous, quoi), c'est bien sûr la construction du film. le père et le fils sont séparés 90% du temps et jouent leurs scènes seuls. ce qui est assez malin, d'abord pour créer une sorte de suspense – le gamin télécommandé qui obéit (il est vrai pas toujours) au doigt et à la voix, quel parent ne rêverait pas d'un pareil système!? – mais surtout éviter qu'on taxe les smith de vouloir trop se mettre en avant, eussent-ils eu tout le temps des scènes à deux, comme c'était le cas dans à la recherche du bonheur (2006)? ici, en plus, il fallait ne pas trop attendrir le public et montrer que le père smith est dur avec son enfant, que rien ne lui sera donné au seul motif qu'il est le "fils de" et que ledit marmot se bat pour mériter du peuple terrien, prompt comme chacun sait à se moquer en dégainant des vannes cyniques bien senties du type "alors bravo!".
en résumé, ce film est moins mauvais que les précédents de shyamalan – probablement parce que l'idée originale n'est pas de lui – naaaan je suis méchant (quoique) et se laisse quand même regarder avec un certain intérêt. ce qui est certain, en revanche, c'est qu'il marquera d'une pierre blanche davantage la carrière de jeune padawan smith que nos mémoires.
brèves de coulisses…
au départ, le film devait s'appeler one thousand a.e. pour la promo du film, sony pictures a présenté sur facebook (entre autres millions de gimmicks promo) une sorte de timelime démarrant en 1908 avec le crash d'un vaisseau alien, pour aboutir, année après année, aux événements du film. un vrai travail de storytelling, comme on dit dans les milieux motorisés. et en effet, after earth n'est pas qu'un film: outre une bd et un roman, un manuel de 300 pages racontant mille ans d'histoire pour expliquer les éléments secondaires du film et le sort de l'humanité a été créé par peter david, michael jan friedman et robert greenberger. c'est la deuxième fois que shyamalan formate son film pour être des blockbusters. d'autant que là, il se fait le relais des scientologues en déclarant qu'il a toujours été fasciné par la peur et ses effets sur l'homme, et que si on apprend à la contrôler, alors on peut tout accomplir. vous me direz c'est ça la scientologie? mais tout le monde sait ça. et je vous répondrai que certes, mais que ça pue tout de même le discours de propagande. pour la petite histoire, la planète où vivent désormais les humains – nova prime – dispose d'un gouvernement tripartite: le primus, chef philosophique rejetant la science, le savant, qui à l'inverse pense que les oeuvres des humains sont essentielles à leur survie, et le united ranger corps (mdr), dont la mission est de protéger les humains. l'arme favorite de ces derniers est le coutelas, qui comprend en fait 22 armes différentes dont la pression maîtrisée des doigts permet d'activer des centaines de fibres intelligentes.