zero dark thirty

Zero dark thirty

réal. kathryn bigelow, scénario mark boal, int. jessica chastain, jason clarke, joel edgerton, jennifer ehle, mark strong, edgar ramirez, kyle chandler, harold perrineau. 2012, 249'. 3 pouces.

le synopsis
la traque, dix années durant, d'oussama ben laden, jusqu'à sa mort, par une équipe des forces spéciales américaines, menée par une femme (chastain).



l'avis
ce film a fait couler pas mal d'encre et a été dans le collimateur du sénat américain, qui l'accusait d'être imprécis et trompeur. forcément, le film s'ouvre sur des séquences de torture, celle que les américains ont pratiquée à loisir pour obtenir des informations – sans en obtenir vraiment, les réseaux extrémistes étant si denses et si difficiles à percer. si bien que, les prisonniers niant, soit par conviction, soit par ignorance, la torture finissait – finit toujours – par alimenter la torture. en l'occurrence le tristement célèbre waterboarding, qui consiste à
couvrir le visage du détenu avec une serviette et à lui verser de l'eau,
le suffoquant progressivement.

comment être fier de ça? comment réagir autrement qu'en adoptant la posture de l'indignation officielle? comment ne pas réagir sans faire comprendre au monde que le silence est une forme d'apologie? ça, c'est pour l'attitude du sénat. même si leon panetta (directeur de la cia de 2009 à 2011) a admis que cette technique, appliquée 183 fois en 2003 (notamment) sur un détenu soupçonné d'être impliqué, avait permis de récupérer des informations qui ont finalement mené à la cache de ben laden.

quant au film lui-même, qui, encore une fois, a fait couler beaucoup d'encre, il part du principe, sans doute sincère au départ, de "raconter ce qui s'est passé". à ceci près qu'un avertissement, à la fin du générique de fin, nous prévient que, s'il repose sur des faits, le film met en scène des personnages, des événements et des dialogues qui n'ont pas existé. bien sûr, la chronologie suit la réalité mais comment apporter du crédit à une fiction revendiquée par le scénariste? ou plutôt, comment voir le film autrement qu'un "divertissement sérieux" (d'où sans doute la réaction du sénat)? le hic, c'est qu'on a tendance à croire ce que la presse nous livre – on n'y peut rien, nous sommes très tôt gavés d'info, c'est dans notre éducation – et à prendre ce que nous voyons pour argent comptant.

mais bref. tout n'est pas inventé dans ce film, loin s'en faut. le raid baptisé "opération neptune's spear" et mené par les seal (l'unité spéciale de la navy) ce 2 mai 2011 à 1h15 du matin durera 40 minutes et aboutira effectivement à la mort du chef d'al-qaïda d'une balle dans la tête. sa mort sera confirmée par l'une de ses femmes, présente sur les lieux pendant l'assaut, mais aussi par des techniques de reconnaissance faciale, puis par des tests adn.

pour certains, son élimination sera légalement (et moralement) justifiée, d'autres la qualifieront d'assassinat perpétré au mépris du droit. les pauvres cons. sans doute ceux-là mêmes qui pensent que tuer de sang-froid plus de 3'000 personnes innocentes représentait un acte légalement irréprochable.

bizarrement, le film n'a pas été inquiété outre mesure après qu'il n'eût remporté aucune récompense majeure aux oscar 2013.

à voir, de toute façon.

brèves de coulisses…
le film devait s'intituler for god and country. mais a été renommé avec le titre que l'on connaît à la diffusion du premier teaser. l'expression est tirée du jargon militaire, qui renvoie aux 30 minutes après minuit, ainsi qu'à un espace-temps où il fait toujours nuit, qu'importe l'heure.

la traque du plus célèbre terroriste des années 2000 a commencé juste après les attentats du 11 septembre sur une information fournie par un prisonnier de guantanamo.

les séquences du raid ont été tournées avec une caméra numérique très sensible pouvant filmer dans des conditions d'éclairage très faible, simulant ainsi les conditions réelles de l'attaque.

la sortie du film (octobre 2012) coïncidait au départ avec les élections présidentielles, ce qui a soulevé un tollé. le film était taxé de propagande pro-obama, le président ayant en effet supervisé l'assaut d'abbottabad, à 50 km au nord d'islamabad, capitale du pakistan. la production a dû la repousser à janvier 2013, après les fêtes et avant les oscar. le film a reçu 4 nominations aux golden globes, dont un de la meilleure actrice dans un drame, remporté par jessica chastain. mais, contrairement à démineurs, du même tandem bigelow-boal, le film aurait trop suscité la polémique s'il avait été reçu, deux mois plus tard, des oscar dits majeurs.

le gars qui se fait torturer au début du film est un acteur français (reda kateb) qu'on a vu dans la saison 2 d'engrenages, l'excellente série policière française, ou mafiosa, autre série française remarquée, mais aussi dans un prophète (jacques audiard, 2009).

 

 

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